La journée des administratrices et des administrateurs engagés qui s’est tenue le 25 novembre dernier a été, grâce à vous, un grand succès.
Près de 300 administrateurs et administratrices, partenaires, membres de nos clubs et commissions, journalistes, ont répondu présent à ce rendez-vous particulièrement attendu dans la vie de l’IFA.
Cet évènement a encore été la preuve du dynamisme et de l’intelligence collective que porte l’IFA .
Résumé de cette conférence:
Avec
- Philippe DESSERTINE, directeur de l’Institut de la Haute-Finance
- Laurence DORS, co-présidente de la commission prospective de l’IFA
- Armand HATCHUEL, professeur émérite au centre de gestion scientifique de MinesParisTech
- Pascal PICQ, paléoanthropologue
CONFÉRENCE D’OUVERTURE : L’ADMINISTRATEUR FACE À L’AMPLEUR, L’ACCÉLÉRATION ET LA CONCOMITANCE DES CRISES.
En introduction, l’anthropologue Pascal Picq nous rappelle qu’au-delà de l’administrateur, l’Humanité toute entière a de tout temps connu des crises. Ce que nous rappelle notre passé, c’est que le mécanisme de crise n’a pas fondamentalement changé et que celle que nous traversons aujourd’hui s’est produite alors que nombre de tendances avaient déjà émergées.
Pour Pascal Picq, si la Terre est redevenue plate, ce n’est pas au sens de l’uniformisation mais bien parce que la diversité des modes de gouvernance est liée aux histoires et cultures des uns et des autres à travers le monde.
« Critiquer l’entreprise, c’est d’abord lui reconnaitre une grande force d’action » – Armand Hatchuel.
Pour Armand Hatchuel, c’est bien l’entreprise moderne qui est l’invention majeure de la fin du XIXème siècle, et la crise que nous vivons aujourd’hui n’est rien d’autre que la conséquence de la puissance des entreprises. Aujourd’hui, la crise nous impose de rediscuter la puissance des entreprises, les doctrines, ce qui est enseigné, la manière de définir une entreprise, le rôle d’un administrateur.
« Dans une logique écosystémique, où la révolution numérique permet de surcroît à chacune et à chacun de créer une activité capable de bousculer le marché mondial, les administrateurs doivent comprendre qu’innover constitue le moyen de maintenir son rang » – Pascal Picq.
Pascal Picq rappelle que, par le passé, chaque entreprise déployait ses compétences, conquerrait des parts de marché, avant que le créateur du forum de Davos ne mette en avant le fait que la logique de Milton Friedman, selon laquelle l’entreprise a pour mission de rémunérer les actionnaires, n’avait plus cours. Car dans une logique écosystémique, il importe d’assurer son succès qui dépendra aussi des autres et de l’environnement. Le terme de progrès a disparu pour laisser la place à la notion d’innovation. En 2007, nous avons basculé dans le monde numérique, dans lequel, contrairement à la première révolution industrielle pendant laquelle des investissements importants étaient nécessaires au développement de l’activité, les smartphones permettent à des hommes et des femmes, partout dans le monde, de créer une activité capable de bousculer le marché mondial. Dans ce nouveau contexte, les administrateurs doivent comprendre qu’innover constitue le moyen de maintenir son rang.
« Si elle ne réside pas dans la monnaie, la confiance devra venir d’ailleurs, en l’occurrence de l’humain, de celui qui porte un projet, mais aussi de l’administrateur, qui établira le lien avec l’investisseur » – Philippe Dessertine.
Pour Philippe Dessertine, nous vivons des bouleversements extraordinaires, dont l’obligation de modifier radicalement le modèle économique en raison du dérèglement climatique et qui impliquera de l’investissement, donc de la confiance, et le basculement vers l’Asie, devenue en 2020 la plus grande zone de production de richesses dans le monde. Cette évolution traduit le retour d’un élément essentiel de l’Histoire en économie : la démographie. L’Asie et ses 4,5 milliards d’habitants constitue le centre économique du monde et le sera pendant tout le 21ème siècle. Au 22ème, l’Afrique devrait probablement être le continent le plus peuplé.
Nous sommes probablement face à la plus importante rupture technologique de tous les temps, car nous n’avons jamais été aussi nombreux sur la planète, et jamais aussi contraints de changer aussi rapidement. Cette nécessité d’investissement induit la nécessité d’une confiance des investisseurs, qui disposent de l’épargne.
En période de crise, qui s’accompagne souvent d’une remise en cause de la monnaie, l’humain se pose en alternative forte au manque de confiance dans l’argent. Si elle ne réside pas dans la monnaie, la confiance devra venir d’ailleurs, en l’occurrence de l’humain, de celui qui porte un projet, mais aussi de l’administrateur, qui établira le lien avec l’investisseur.
« Le devoir de vigilance n’est plus un devoir pour l’administrateur, mais bien une partie prenante de sa fonction » – Armand Hatchuel.
Pour Armand Hatchuel, l’administrateur doit aujourd’hui assumer des responsabilités paradoxales, dont celle consistant à appréhender des processus révolutionnaires. Il doit se préoccuper de l’activité, être responsable d’une accélération du processus d’innovation, mais aussi se montrer responsable, devant le monde, des transformations qu’il opère.
« Chacun évoluant dans un environnement et parce que le succès modifie celui-ci et induit de savoir changer, les facteurs de réussite d’hier et d’aujourd’hui ne seront pas forcément ceux de demain » – Pascal Picq.
Pour Philippe Dessertine, compte tenu de la grande complexité de l’environnement économique actuel, il n’est pas question de faire peser sur l’administrateur une obligation de résultat en matière de transparence, mais de s’assurer qu’il a essayé de faire comprendre que l’investisseur a été sensibilisé aux problématiques posées.
Armand Hatchuel rappelle que l’innovation n’a jamais cessé dans l’histoire de l’humanité et le phénomène prend toujours plus d’ampleur. Un administrateur n’est pas seulement pragmatique, mais se trouve guidé par des doctrines, dont la loi et les codes. Désormais, l’administrateur n’est plus seulement en charge de la performance économique et financière, mais aussi des normes de bonne gestion et de la vie de l’écosystème, dont le non-respect entraînerait des conséquences certaines.
« La diversité permettra de maîtriser la performance de demain » – Philippe Dessertine
Interrogés sur l’enjeu de diversité, Pascal Picq indique que personne ne maîtrisant l’ensemble des compétences requises pour innover, il ne s’agit plus pour les administrateurs de se reposer sur leur expérience passée, mais de connaître clairement leur mission et de s’adjoindre des compétences le cas échéant. Philippe Dessertine s’inscrit en ce sens car, selon lui, la diversité se révèle nécessaire et ne se limite pas uniquement au genre, mais s’étend aussi aux origines sociales, notamment parce que la représentation de la création de valeur est en profonde mutation aujourd’hui. Pour Armand Hatchuel, les administrateurs peuvent discuter du fonds, des normes à fixer collectivement, des objectifs à définir, ou encore de la raison d’être de l’entreprise. La définition d’un nouveau cadre est nécessaire pour permettre aux entreprises de continuer de jouer leur rôle de transformation.
En conclusion, Laurence Dors, présidente de la commission prospective et recherche de l’Institut français des administrateurs, retient de ces échanges trois idées majeures : l’administrateur traducteur, la différence de fonctionnement entre les macaques et les chimpanzés, et le principe d’intelligence augmentée, qui ne manqueront pas d’enrichir les travaux conduits par la commission.
Pour visualiser le replay de la conférence 2 sur le thème de l’économie circulaire
c’est ici: https://ifa-asso.illisite.info/quelles-perspectives-pour-de-nouveaux-modeles-lexemple-de-leconomie-circulaire/
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